30.06.2015 | Brevets

150626cibus

Le colza GM de l'entreprise Cibus ne pourra pas être cultivé en Europe pour l'instant.


Le colza génétiquement modifié de l’entreprise américaine Cibus sera interdit de culture en Europe jusqu’à nouvel ordre.
Dans un courrier adressé aux autorités des Etats membres de l’UE, la Commission européenne précise qu’une décision controversée de l’Office fédéral de protection du consommateur et de sécurité alimentaire (BVL) relative au colza transgénique de la firme américaine Cibus ne pourra pas être mise en œuvre. En février encore, le BVL avait confirmé à Cibus que son colza n’était pas soumis à la législation sur les OGM et qu’il pouvait donc être mis en culture immédiatement, sans procédure d’autorisation ni étiquetage. Le colza en question a été modifié génétiquement à l’aide d’oligonucléotides, c’est-à-dire de courtes séquences d’ADN synthétique.

Dans son courrier, la commission explique qu’il faut éviter jusqu’à nouvel ordre la mise en culture de plantes fabriquées à partir d’oligonucléotides, rappelant qu’il est illégal de cultiver sans autorisation des plantes transgéniques. Par cet avis, elle soutient la position des opposants qui avaient demandé le retrait immédiat de la décision du BVL. La Commission européenne entend se prononcer sur le statut juridique de ces plantes d’ici la fin de l’année et demande aux Etats membres d’interdire jusque-là toute dissémination non contrôlée. « Il apparaît en l’occurrence que le BVL a pris parti en faveur de l’industrie, créant une situation de fait accompli », dénonce Annemarie Volling du Groupement agriculture rurale AbL. « C’est au ministre de l’agriculture Christian Schmidt qu’il appartient de faire retirer la décision du BVL. La semence illégale ne doit pas atterrir dans les champs, sans quoi le colza rendu résistant à des herbicides risque de se propager de manière incontrôlée, sans possibilité de retour en arrière, menaçant l’agriculture et l’industrie alimentaire sans OGM. »

Le BVL avait argué que le procédé de fabrication du colza de Cibus est assimilable à une sélection par mutation, laquelle n’est pas considérée comme une technique de transformation soumise à régulation, d’après la législation de l’UE. Les procédés de sélection par mutation sont utilisés depuis de nombreuses années et ne relèvent pas du génie génétique. Ils sont en partie critiqués parce qu’ils recourent à des produits chimiques et parfois aux rayonnements radioactifs, mais jusqu’ici, ils échappent à toute régulation. L’usage d’oligonucléotides, par contre, relève du « Genome Editing » ou de la « biologie de synthèse » et doit être considéré comme une technique de génie génétique au sens de la législation européenne. Ce procédé fait appel à des fragments d’ADN synthétique produits en laboratoire ; ces fragments sont ensuite introduits dans le génome de la plante pour le modifier à un endroit défini. La modification est ponctuelle, mais elle peut aussi concerner des séquences d’ADN plus longues, si l’opération est répétée. Le mécanisme précis n’étant pas encore connu, il peut en résulter des effets indésirables chez les plantes. Une nouvelle étude norvégienne montre qu’en ce qui concerne les risques, il existe un besoin considérable de recherche.

« La Commission européenne ne doit pas exclure globalement de la législation sur les OGM les nouvelles techniques de manipulation du génome telles le « Genome Editing », souligne Christoph Then de Testbiotech. « Sinon, le colza de Cibus risque d’ouvrir la porte à toute une série de produits issus des nouvelles techniques de biotechnologie, qui seront diffusés sur le marché sans évaluation des risques dans le cadre d’une procédure d’autorisation, sans étiquetage ni inscription dans un registre. »