170630PatentMalgré une politique plus sévère d'interdiction, la sélection conventionnelle restera brevetable dans le futur. Photo :Einberger/argum

 

Les 38 Etats membres de la Convention sur le brevet européen (CBE), dont la Suisse, ont adopté le 29 juin 2017 à La Haye des règles plus strictes pour l’octroi de brevets sur les plantes et les animaux. De nombreuses failles limitent toutefois la portée de cette décision.

Ces dernières années, l'Office européen des brevets (OEB) a accordé plus de 120 brevets sur des plantes et des animaux obtenus de manière conventionnelle (non-OGM), tandis que de nombreuses demandes sont pendantes. Ces brevets restreignent l‘accès aux semences pour la sélection et renforcent la mainmise d‘une poignée de multinationales sur notre alimentation. Les ONGs et de nombreuses organisations d‘agriculteurs et de sélectionneurs ont pris position pour une interdiction de ces brevets. En juin 2016, la coalition Pas de brevets sur les semences a remis plus de 800’000 signatures pour exiger un changement de pratique de l‘OEB. Le Parlement européen et la Commission européenne ont également demandé de limiter l'octroi des brevets sur les plantes et les animaux au seul domaine du génie génétique.

ProSpecieRara, SWISSAID et Public Eye saluent l’a décision des Etats membres de la CBE d‘interdire les brevets sur les plantes et les animaux issus de « processus essentiellement biologiques ». Des brevets controversés tels que celui de Syngenta sur le poivron et de Monsanto sur le melon, contre lesquels une large coalition d‘ONGs a recouru, ne devraient désormais plus être accordés. La décision adoptée contient toutefois de nombreuses lacunes. L‘interditction concerne en effet uniquement les brevets sur les plantes et les animaux issus d’un croisement et d‘une sélection. Cette définition étroite exclut de nombreuses techniques utilisées aujourd’hui dans la sélection conventionnelle. Les brevets récemment obtenus par Carlsberg et Heineken sur l’orge brassicole et la bière ne seront ainsi pas remis en question. Par ailleurs, les plantes pouvant être obtenues aussi bien par des techniques conventionnelles qu‘en ayant recours à la biotechnologie restent brevetables.

SWISSAID, Public Eye et ProSpecieRara avaient travaillé sur une proposition alternative avec les autorités suisses et des représentants de l’industrie. Elle a été présentée par la délégation suisse à la réunion de la CEB, mais n’a pas été prise en compte. Alors que les ONGs se sont vu refuser la possibilité de participer, l’industrie a eu une grande influence sur le processus, comme l‘illustrent des documents confidentiels. En Suisse, quelque 9‘000 personnes ont signé une lettre ouverte, qui demandait à la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga de s’engager à la CEB en faveur d’une interdiction efficace des brevets sur les plantes et les animaux issus de la sélection conventionelle. Les signatures ont été remises le 23 juin 2017 à l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IPI).